Le thème, «La durabilité au cœur de l’action douanière pour les personnes, la prospérité et la planète», traduisait l’importance des missions douanières et les défis actuels en termes de protection de la société (défis environnementaux, socioéconomi­ques et sanitaires) face aux menaces de toutes sortes.

Etant tout d’abord une crise sanitaire, la pandémie de la Covid-19 a aussi et surtout un impact économique négatif plus retentissant. En effet, plusieurs crises, guerres, évènements graves ont eu lieu, mais sans des conséquences économiques pareilles. C’est une pandémie qui concerne tous les continents, tous les pays, toutes les races et toutes les économies (formelle ou informelle). L’impuis­sance est générale et les réactions restent parcellaires ; chaque pays s’occupe de ses populations.

L’économie mondiale est bloquée ou est en stagnation, car les trafics maritime, aérien et terrestre entre pays ou blocs d’intégration sont réduits ou suspendus jusqu’à nouvel ordre. L’incer­titude est réelle puisque des solutions ne sont pas encore trouvées pour vaincre la pandémie.

Les organisations internationales chargées des questions économiques ou d’intégration n’ont pas pu anticiper et sont conscientes des conséquences néfastes sur l’économie mondiale et les blocs régionaux. Ensuite, la crise a montré les limites des organisations internationales. La coopération entre administrations douanières a aussi montré ses limites, car la pandémie affecte les échanges commerciaux.
La crise a surtout bouleversé les missions douanières.

En premier lieu, l’on note pour les douanes une mission fiscale et économique en nette régression.
Les administrations douanières ont une mission fiscale qui consiste à collecter des recettes sur des marchandises importées ou exportées pour le compte du budget de l’Etat. Cette fonction de collecte de droits et taxes aux frontières varie d’un pays à un autre ou d’une région à une autre.

En Afrique, les administrations des douanes mobilisent une bonne partie des recettes fiscales qui doivent alimenter le budget des Etats. En effet, dans la plupart des pays africains, les droits et taxes collectés par les douanes représentent 30 à 70% des recettes du budget national.

La crise a considérablement affecté cette mission du fait de raisons évidentes liées à la faiblesse des échanges commerciaux.

Les recettes douanières connaissent une baisse qui risque de s’accentuer au fur et à mesure que se prolongera la crise. Les objectifs de recettes assignés aux administrations douanières seront forcément revus à la baisse pour prendre en compte la diminution du volume des échanges internationaux et la baisse du fret maritime.

Les principaux pays fournisseurs des pays africains (pays asiatiques comme la Chine, l’Inde, la Thaïlande…), par exemple, sont très touchés par la pandémie et cela a entraîné l’arrêt des exportations.

Au niveau européen, les droits à l’importation prélevés aux frontières de l’Union douanière, ainsi qu’une partie de la Tva, contribuent au budget général de l’Union européenne (Ue). Mais avec la crise, une décision portant sur la suspension temporaire des droits à percevoir sur certaines catégories de marchandises est déjà prise par les autorités communautaires. En effet, «la Commission européenne a annoncé renoncer temporairement à percevoir les droits de douane et la Tva sur les importations de matériel médical, afin de contribuer à la lutte contre le coronavirus»#. Cette mesure de suspension des droits et taxes et de Tva sur les importations des pays tiers a été prise pour rendre plus facile l’obtention sur le plan financier de certains équipements médicaux.

La mission économique qui consiste à protéger les industries locales connaît une régression. La crise a touché les entreprises commerciales, industrielles, de services, bref toute la chaîne de l’économie formelle ou informelle.

Cependant, les douanes ont maintenu les activités de dédouanement et continuent de contrôler les marchandises sous douane. L’accompagnement consiste aussi à gérer la délivrance des titres et autres documents nécessaires au dédouanement des marchandises exonérées ou bénéficiant de suspension des droits et taxes au moment de leur importation.

La dématérialisation de certaines procédures douanières a permis aux douanes, même en pleine crise pandémique, de continuer à assurer la continuité de ses services. Dans la plupart des pays, elle a permis aux opérateurs d’accomplir la quasi-totalité des formalités nécessaires aux frontières, sans le moindre contact physique avec l’Adminis­tration des douanes.

Au vu des difficultés causées dans le monde par la pandémie, les parties contractantes aux Conventions sur l’admission temporaire ont été invitées à offrir des facilités suffisantes aux détenteurs de Carnets Ata et à leurs représentants, afin de leur permettre de faire leurs opérations dans les meilleurs délais et sans frais supplémentaires.

Le Carnet Ata permet de faire transporter des marchandises d’un pays à un autre sous le couvert d’un document unique, sans rupture de charge. Il permet ainsi de faciliter les opérations douanières du fait de la souplesse des contrôles.

C’est pourquoi il est recommandé en temps de crise par l’Omd, car son efficacité est reconnue.
Les douanes accompagnent par ailleurs les autorités publiques dans la mise en œuvre de plans de contingence, de sauvegarde de l’économie ou de redressement en mettant en œuvre des stratégies visant à accompagner le secteur privé, en permettant par exemple des reports de paiement ou de régularisation des droits et taxes, des prorogations de délais de marchandises sous des régimes de suspension des droits, des facilitations supplémentaires dans les procédures de dédouanement.

C’est le cas des pays africains comme le Sénégal et la Côte d’Ivoire qui ont pris des mesures fiscales pour mieux faire face à la crise en soutenant les entreprises.

L’Union européenne a élaboré un plan de relance européen afin d’endiguer les conséquences économiques désastreuses de la pandémie de coronavirus.

La crise a eu aussi comme effet de changer la donne concernant les autres missions douanières.
En second lieu, l’on relève pour les douanes une mission sécuritaire et d’accompagnement des autres administrations en nette progression.

Les douanes ont aussi une mission d’accompagnement des autres administrations. En effet, elles appliquent aux frontières d’autres réglementations pour le compte d’autres services relevant de différents ministères (Agriculture, Elevage, Com­mer­ce, Sécurité, Environ­nement, etc.).

Les douanes, dans le cadre de leur mission de concours en temps normal, apportent au quotidien leur soutien aux services des ministères chargés de la Santé à travers la lutte contre le trafic illicite des médicaments, le contrôle des normes sanitaires aux frontières, la fourniture de dons aux structures sanitaires, entre autres.

En période de crise, l’apport des douanes aux autorités sanitaires est déterminant pour prendre en compte l’urgence liée à la prise en charge et au dédouanement des produits et matériels médicaux nécessaires.
C’est pourquoi il est important de relever l’importance du contrôle rigoureux des frontières en période de crise. Les douanes, du fait de leur position stratégique aux frontières, œuvrent en étroite collaboration avec toutes les forces de sécurité pour renforcer le dispositif.

Certes la lutte contre la propagation dans le monde de la Covid-19 a nécessité des contrôles sanitaires rigoureux aux frontières terrestre et aérienne surtout, mais elle a aussi nécessité l’arrêt des déplacements, entraînant un arrêt ou une diminution nette des échanges commerciaux. Ainsi, les frontières ont été fermées et leur surveillance renforcée par les administrations douanières.

La lutte contre la contrefaçon par les douanes en ces moments de crise reste un défi réel. La criminalité3 augmente et s’adapte à la pandémie.

Alors que le monde se débat contre la Covid-19, des délinquants profitent de la situation pour mener des activités frauduleuses. Un nombre alarmant de saisies ont été rapportées con­cernant des fournitures médicales essentielles de contrefaçon, telles que de faux masques de protection ou encore de faux désinfectants pour les mains.

C’est pourquoi l’Omd appelle ses membres à la vigilance. Elle est déterminée à poursuivre sa coopération avec tous ses partenaires afin de démanteler les chaînes logistiques des produits de contrefaçon qui mettent en danger des millions de vies humaines.

Pour faire face à la situation, certains gouvernements ont pris des mesures visant à introduire des régimes de licences à l’exportation pour certaines catégories de fournitures médicales essentielles telles que les masques, les gants et les vêtements de protection.

Les pays africains qui sont les plus touchés par la contrefaçon de produits médicaux n’ont pas un plan de riposte face à ce phénomène qui n’est pas nouveau.

Cependant, il faut se réjouir des mesures prises par les gouvernements en rapport avec les douanes, pour disposer de stocks de médicaments et de matériels médicaux, empêcher la spéculation, permettre la production de gels, de masques au niveau local et assurer normalement la distribution et la vente.
En ces moments de crise, les douanes veillent à ce que les réseaux criminels ne puissent écouler des produits contrefaits. Cette vigilance aux frontières permet de ne pas compromettre davantage la santé publique.

L’utilisation de médicaments, de masques, de gels ou d’autres appareils de réanimation non conformes pourrait accroître le nombre de décès et de contaminés.

Au-delà du système sanitaire, il est clair que la pandémie de la Covid-19 vient rappeler les nombreux déficits en infrastructures socio-économiques de base dans certains pays. Cette crise sanitaire pourrait fragiliser davantage un environnement social relativement précaire, exacerbant les besoins des populations et la précarité de certains ménages avec une hausse du chômage en perspective.

C’est l’occasion de renforcer les moyens des administrations douanières dont les agents sont exposés à des risques, du fait de leurs positions aux frontières.

La crise a un impact économique considérable, car restreignant considérablement les échanges commerciaux entre pays. L’économie mondiale est touchée de plein fouet.

D’ailleurs, la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (Cea) anticipe sur une croissance de 1,8% contre 3,2% prévue en 2020.
Les administrations douanières sont au cœur des stratégies des entreprises. Elles accompagnent les Etats dans leurs missions régaliennes de sécurité.
C’est pourquoi l’un de leurs défis est d’accompagner les politiques publiques pour l’autosuffisance alimentaire, la production et l’industrialisation pouvant permettre de conquérir une «vraie et réelle souveraineté» des Etats africains.
C’est le moment de réfléchir sur des stratégies douanières concertées pouvant accompagner le secteur privé : il s’agira de promouvoir des programmes tels que le statut d’Opérateur économique agréé (Oea), et d’accélérer davantage la dématérialisation des procédures douanières qui a montré ses avantages en ces temps de crise.

Il faut se réjouir du fait que dans beaucoup de pays, les douanes ont réussi le développement et l’achèvement de la transformation digitale, ce qui a produit des résultats satisfaisants.

Ce «virage technologique réussi» leur a permis, malgré la pandémie, de continuer à assurer leurs missions de facilitation et de sécurisation de la chaîne logistique internationale.

La crise liée à la pandémie de la Covid-19 aura sûrement une influence ou un impact sur le droit douanier dont les règles s’adaptent et évoluent au gré des mutations de toutes sortes causées par le développement de la science.

Après la crise, les normes douanières devraient pouvoir subir des mutations profondes pour prendre en compte les nouvelles menaces bactériologiques …

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